L'impôt, ce grand oublié de la répartition des actifs
Un client peut avoir plusieurs objectifs de placement différents et des niveaux de tolérance au risque qui varient en fonction desdits objectifs. Dans un environnement où les comptes d’épargne ont différentes caractéristiques fiscales (ex. REER, CELI, REEE), l’Institut québécois de planification financière et l’institut CFA suggèrent de considérer les impôts latents dans la répartition des actifs pour mieux représenter le pouvoir d’achat.
Prenons par exemple une personne qui a un portefeuille composé de 50 % de fonds à revenu fixe et de 50 % de fonds de croissance, dont 100 000 $ dans un REER et 100 000 $ dans un CELI. La manière optimale et traditionnelle serait de répartir les actifs avant impôt et selon le compte idéal, c’est-à-dire de prioriser les fonds à revenu fixe dans le REER et les fonds de croissance dans le CELI. Nous aurions donc l’image suivante :
Montant brut (avant impôt) | REER | CELI | Total | Répartition avant impôt |
Fonds à revenu fixe | 100 000 $ | - $ | 100 000 $ | 50 % |
Fonds de croissance | - $ | 100 000 $ | 100 000 $ | 50 % |
Total | 100 000 $ | 100 000 $ | 200 000 $ | 100 % |
Toutefois, pour illustrer le pouvoir d’achat, il faut convertir les sommes après impôt selon un taux d’imposition moyen estimé selon l’objectif. Dans notre cas, nous prenons pour hypothèse que l’épargne est pour la retraite, et que le taux d’imposition moyen à la retraite est de 40 %. Ainsi, nous obtenons l’exposition réelle en termes de pouvoir d’achat suivante :
Montant net (après impôt) | REER | CELI | Total | Répartition après impôt |
Fonds à revenu fixe | 60 000 $ | - $ | 60 000 $ | 37,5 % |
Fonds de croissance | - $ | 100 000 $ | 100 000 $ | 62,5 % |
Total | 60 000 $ | 100 000 $ | 160 000 $ | 100 % |
Nous pouvons constater qu’il y a une surpondération dans les fonds de croissance lorsque nous sommes dans un environnement après impôt. Le portefeuille est par conséquent plus risqué, et donc beaucoup plus volatil.
En finance, lorsque l’on fait référence aux notions de risque et de volatilité, il s’agit en fait de l’écart-type. Ce concept bien connu mesure l’évolution d’un placement par rapport à son rendement moyen sur une période donnée.
Puisque le calcul de l’écart-type dépend du rendement, nous devons le calculer après impôt.
Prenons l’exemple d’un REER procurant des rendements annuels avant impôt de -2%, 4% et 10% sur une période de trois ans. Le rendement moyen avant impôt est de 4% et l’écart-type est de 6%. Si on considère un taux d’imposition de 40%, le rendement moyen après impôt est de 2,40%, soit [4% X (1-40%)] et l’écart-type après impôt est de 3,60%, soit [6% X (1-40%)]. Dans ce cas, la personne aurait reçu 60% du rendement et assumé seulement 60% du risque.
Pas encore convaincu de la volatilité après impôt? Une perte de 10 000 $ dans un REER avec un taux d’imposition de 40% est en réalité une perte du pouvoir d’achat de 6 000 $ après impôt, contrairement à la même perte dans un CELI, qui équivaut à 10 000 $ après impôt. La perte dans un REER est moins importante que la même perte dans un CELI!
Toutefois, cela ne veut pas dire que nous devons prendre plus de risques dans le REER, mais plutôt qu’on devrait considérer la répartition des actifs après impôt pour uniformiser le risque.
Suivant cette logique, lorsque nous répartissons les actifs après impôt, nous obtenons l’image suivante :
Montant net (après impôt) | REER | CELI | Total | Répartition après impôt |
Fonds à revenu fixe | 60 000 $ | 20 000 $ | 80 000 $ | 50 % |
Fonds de croissance | -$ | 80 000 $ | 80 000 $ | 50 % |
Total | 60 000 $ | 100 000 $ | 160 000 $ | 100 % |
Finalement, nous devons convertir ces montants en brut pour avoir le montant réel à investir :
Montant brut (avant impôt) | REER | CELI | Total | Répartition avant impôt |
Fonds à revenu fixe |
| 20 000 $ | 120 000 $ | 60 % |
Fonds de croissance | - $ | 80 000 $ | 80 000 $ | 40 % |
Total | 100 000 $ | 100 000 $ | 200 000 $ | 100 % |
Pour l’instant, la méthode de répartition après impôt en est encore à ses débuts pour la majorité des institutions financières, gestionnaires de portefeuille et la conformité. Le plus difficile dans cette méthode est d’estimer le taux d’imposition. Mais avec l’approche traditionnelle, c’est littéralement présumer que le taux d’impôt est nul, ce qui est faux.
Tout comme l’on choisit de présenter un bilan financier après impôt, il est préférable de faire une estimation du taux d’imposition pour la répartition des actifs plutôt que d’agir comme s’il n’y avait pas d’impôt.
Feriez-vous une projection de retraite sans tenir compte des impôts au moment du retrait des REER? Alors pourquoi ne pas le faire en matière de placement?
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