Assurance et langage clair : aider ses clients à comprendre les notions complexes
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Cet article est tiré du Magazine CSF que vous pouvez consulter directement ici. |
Vous venez de clore une discussion avec votre client au sujet de son assurance vie. Vous avez l’impression qu’il vous a bien suivi dans vos explications, pourtant, à la lecture du contrat, il est surpris que le bénéficiaire soit irrévocable. À votre tour d’être surpris puisque son choix était clair, selon vous. Mais l’était-il vraiment?
« Les conseillers ont une obligation de bien conseiller et informer leurs clients sur les produits offerts. Or, tous les consommateurs n’ont pas le même niveau de littératie financière », rappelle Geneviève Beauvais, avocate au développement professionnel et à la qualité des pratiques à la Chambre de la sécurité financière (CSF).
Même les règles de base ne sont pas toujours simples à comprendre pour bien des gens. « Les conseillers doivent vérifier que les consommateurs ont bien compris ce qui leur a été transmis. La vigilance est de mise. Un bon truc est de demander de la rétroaction au client. S’il a de la difficulté à reformuler dans ses propres mots, il y a lieu de reprendre les explications dans un langage plus accessible », suggère-t-elle.
Même si la documentation fournit une mine d’informations, ce n’est pas toujours suffisant. Rappelez-vous que selon un sondage Léger1 , à peine 20 % des assurés lisent leur police intégralement. « Les conseillers ont parfois peur d’infantiliser leurs clients à force d’expliquer, mais il vaut toujours mieux en dire plus que moins. Contribuer à leur éducation financière, c’est agir dans leur intérêt, mais cela aide aussi à établir un climat de confiance, un élément essentiel pour bâtir une relation à long terme », explique Mme Beauvais.
Voici une liste de termes souvent mal compris et comment bien les expliquer :
Révocable ou irrévocable
Votre client doit comprendre toutes les implications de sa décision à ce chapitre. En désignant un bénéficiaire irrévocable dans son contrat d’assurance, le titulaire ne pourra le révoquer qu’en obtenant le consentement écrit du bénéficiaire désigné. Si l’irrévocabilité de la désignation a été confirmée par testament, et non dans le contrat d’assurance, elle peut être révoquée postérieurement par un autre testament qui contient une clause précise à cet effet puisque, dans ce cas, elle est toujours révocable.
De plus, qu’ils soient mariés ou unis civilement, la situation des conjoints soulève généralement beaucoup de questions. Le divorce ou la dissolution de l’union civile entraîne l’annulation de la désignation de bénéficiaire irrévocable dans un contrat d’assurance, mais pas la séparation de corps. Là encore, si le titulaire veut désigner une autre personne, il devra obtenir le consentement écrit du conjoint (démarche qui pourrait se révéler difficile dans le contexte…). Le changement de bénéficiaire peut aussi se faire par testament à condition que la désignation ait été faite à titre révocable dans le contrat d’assurance.
Délai de carence
Pour éviter de mauvaises surprises à votre client, vous devez bien l’informer de la durée de la période pendant laquelle il n’aura pas droit au bénéfice de l’assurance. Ce délai est différent d’un produit à l’autre et peut aller jusqu’à 90 jours, voire plus. Le professionnel ne saura trop lui recommander de se constituer un fonds d’urgence pour pallier le manque de rentrées d’argent.
Héritiers légaux
Votre client peut être tenté d’utiliser cette expression pour désigner les bénéficiaires de son assurance vie, pensant que cela inclut son conjoint et ses enfants, dont ceux à naître. Dans l’esprit de la loi, cette désignation n’est pas assez claire, ce sont donc les règles du Code civil qui s’appliqueront. Cela peut avoir une incidence importante pour les proches. Par exemple, un conjoint de fait ne recevra rien du capital assuré. Si la personne est mariée, l’assureur versera un tiers à l’époux ou l’épouse et les deux tiers aux enfants. Ce n’est peut-être pas ce que le titulaire aurait voulu.
Saisissable ou insaisissable
Les biens insaisissables sont protégés, c’est-à-dire qu’ils ne peuvent être saisis pour rembourser un créancier. Un des nombreux avantages de la prestation de décès versée à un bénéficiaire, c’est qu’elle est exclue de la succession de l’assuré. Par conséquent, il est impossible de la saisir. Par contre, s’il n’y a pas de désignation de bénéficiaire, le capital peut être saisi par les créanciers de la succession. C’est là une autre conséquence liée à la désignation du bénéficiaire que votre client doit bien comprendre.
Fonds immobilisés
L’immobilisation, c’est une restriction qui est appliquée à un fonds enregistré de revenu de retraite (FERR) ou un compte de retraite immobilisé (CRI). Ce que le détenteur doit savoir, c’est que l’argent qui est contenu dans ces outils de placement ne peut être retiré (sauf dans certaines circonstances) parce qu’il doit servir à procurer un revenu à la retraite. Au moment où vous ouvrez ce type de régime pour votre client, il devra bien comprendre qu’il ne pourra pas profiter de cet argent pour subvenir à ses besoins avant la retraite et, par le fait même, qu’il a besoin d’une stratégie financière pour éviter de se retrouver démuni en cas de coup dur.
Prime et coût de l’assurance
Ces termes sont mal compris par les consommateurs dans le cas de certains types d’assurance vie universelle. Avec ces produits, le montant de la prime calculée par l’assureur inclut le coût de l’assurance et une somme d’argent qui constitue de l’épargne. Celleci est laissée dans un fonds de capitalisation, où elle pourra générer du rendement. Tout va bien les premières années alors que le coût de l’assurance est moindre que le montant de la prime annuelle. Mais ce coût augmente avec le temps. Quand les rendements ne sont pas au rendez-vous, il arrive qu’il n’y ait plus assez d’argent dans le fonds de capitalisation pour couvrir le montant de la prime. Pour conserver son assurance, votre client doit alors ajouter un montant supplémentaire, qui peut être élevé. Cette situation entraîne un nombre important d’appels de consommateurs qui n’ont pas bien saisi de quoi il retournait. En présentant le produit à votre client, assurez-vous de lui montrer des projections raisonnables, optimistes, mais aussi pessimistes pour bien lui faire réaliser qu’il y a un risque inhérent à ce type d’assurance. S’il n’est pas prêt à l’accepter, un autre produit pourrait mieux lui convenir. Assurez-vous également qu’il lit bien l’information qui lui est envoyée chaque année sur son assurance. Cela lui évitera des surprises désagréables.